Cet article a été initialement publié sur Le Nouvelliste
CHRONIQUE – Paule Vermot-Desroches, Le Nouvelliste
Ça ne faisait que quelques mois, six à peine, qu’elle avait été élue conseillère municipale que déjà, l’idée de la mairie avait commencé à germer dans la tête de Pascale Albernhe-Lahaie. Autour d’elle, son esprit qu’elle qualifie d’analytique voyait déjà tant de choses qui pouvaient être améliorées.
La première fois qu’elle a évoqué la mairie, se souvient-elle en riant, c’était autour d’une table, lors d’un souper en marge des assises de l’Union des municipalités du Québec, en 2022. «Heille, me semble que je pourrais faire ça»!
Autour d’elle, moins d’enthousiasme que de chuchotements. À cette même table, d’autres collègues songeaient déjà à la mairie… mais n’avaient jamais affiché leurs couleurs de la sorte.
Cet épisode, elle le raconte avec plus de détachement aujourd’hui. En quatre ans, la conseillère municipale du district des Rivières a appris les codes, a compris dans quel monde elle baignait désormais. Et ce monde, elle veut le changer.
«J’étais à la croisée des chemins, je ne voulais pas revivre le même quatre ans. Il y avait des tensions et je trouvais ça difficile. Je me suis dit: qu’est-ce qui est en mon pouvoir? Mon pouvoir est celui de rassembler une équipe, de mettre en action la vision de gestion que j’ai pour notre ville.»
— Pascale Albernhe-Lahaie, candidate à la mairie de Trois-Rivières et cheffe de Trois-Rivières Ville Forte
Devenue cheffe de Trois-Rivières Ville Forte, Pascale Albernhe-Lahaie est catégorique: il faut plus de planification à Trois-Rivières. Et le rôle de l’élu doit en être un davantage engagé dans cette planification, avec les fonctionnaires.
«La phrase qu’on entend le plus souvent, c’est: il faut faire confiance à nos fonctionnaires. Oui, on peut faire confiance, mais il y a une différence entre faire confiance et être désengagé. Quand on est désengagé, ça donne une administration laxiste qui laisse passer les choses, qui ne cherche pas à innover ou à s’améliorer», croit-elle.
Pascale Albernhe-Lahaie, candidate à la mairie de Trois-Rivières et cheffe de Trois-Rivières Ville Forte. (Stéphane Lessard/Le Nouvelliste)
La cheffe de Trois-Rivières Ville Forte estime qu’il a manqué de leadership politique à Trois-Rivières depuis quatre ans.
«Ça fait aussi en sorte que les fonctionnaires sont laissés à eux-mêmes. Les projets nous arrivent et ils sont déjà ficelés, prêts», relate-t-elle.
Ainsi, dès qu’une question est posée, on pointe du doigt celui ou celle qui ose questionner. On catalogue la personne comme faisant perdre du temps alors que tout est prêt à avancer. Mais pour elle, c’est davantage une méthode de travail, une façon de bien gérer ensemble, d’apporter des idées, plutôt que de se contenter d’un maigre rôle d’administrateur qui endossera toutes les décisions sans rien dire. «Il faut être plus en amont, et impliquer les élus dès le départ», croit-elle.
On lui a reproché de faire de la microgestion. On l’a même accusée d’être à l’origine du départ de fonctionnaires, ce qui, elle le répète, a été lancé sans preuve.
«De la microgestion? Non, c’est de la bonne gestion! C’est l’inverse d’être désengagé. C’est le fait de bien travailler. Je suis une personne très analytique. Je repère super vite les petits enjeux, les soucis, je fais des liens vite. Jonathan Bradley m’a déjà dit: chaque fois que tu parles, tu vois tout le temps les angles morts. Ce n’est pas un angle mort, c’est une vision globale», considère la candidate.
Treize des quatorze districts auront sur leur bulletin de vote un candidat de Trois-Rivières Ville Forte. La grande majorité n’ayant pas d’implication passée en politique, ce qui constitue également un avantage, estime la cheffe qui continue de croire que pour ramener une certaine harmonie, il fallait une page blanche.
Pourtant, depuis quatre ans, elle a eu des alliés autour de la table. A-t-elle cherché à les convaincre de joindre ses rangs? Ce n’était pas le plan, convient-elle.
«C’est vraiment une vision de gestion que j’avais. Non seulement tu pars d’une page blanche, mais c’est d’avoir les meilleurs autour de moi. Je ne dis pas que les autres n’étaient pas bons, mais ils traînent un passif, je connais leurs personnalités. Je veux faire de la politique différemment. Quelqu’un qui est plus bagarreur, ce n’est pas comme ça que j’envisage de faire un travail professionnel autour de la table pour contribuer à l’avancement positif de notre ville», résume-t-elle.
Un de ses engagements clés dans cette campagne? Mieux planifier le développement de la ville. D’où l’idée d’un Plan d’immobilisations et de développement qui s’échelonnera sur dix ans plutôt que trois. À Trois-Rivières, estime-t-elle, nous sommes trop réactifs, et pas assez proactifs.
Elle cite comme exemple ces trop nombreux développements domiciliaires qui ont été planifiés sans nécessairement qu’on les coordonne avec un plan de mobilité et de fluidité de la circulation. Ou encore ce flou qui règne encore sur la capacité réelle de nos réseaux de gestion des eaux usées et pluviales, croit-elle.
Une meilleure planification équivaudra aussi à cesser le gaspillage. Elle appuie tellement fort sur ces mots. «Il y en a partout», soutient-elle, quelque part entre le rire et le découragement.
Ce bac à jouets qu’elle souhaitait acquérir pour quelques centaines de dollars dans une quincaillerie et qui aurait pu servir à un parc de son district, mais qui sortait finalement à 5000 $ lorsqu’on y passait le filtre de l’approvisionnement public.
Cette équipe municipale qui se déplace pour venir réparer un nid-de-poule, mais qui ne pourra répondre à une autre demande citoyenne sur place parce qu’il faut que le citoyen en fasse d’abord la requête au 311, nécessitant un autre déplacement plus tard.
Pascale Albernhe-Lahaie, candidate à la mairie de Trois-Rivières et cheffe de Trois-Rivières Ville Forte. (Stéphane Lessard/Le Nouvelliste)
Ce n’est donc pas pour rien qu’elle fait des services aux citoyens sa promesse phare. Un déclic qui s’est fait dans sa tête le jour où l’on a retiré les toilettes chimiques d’un parc où plusieurs retraités avaient l’habitude d’aller se divertir.
Un meilleur déneigement, l’entretien des rues, des parcs plus propres… L’idée que lorsque le citoyen sort de chez lui, il se sent bien.
Miser sur la santé, la sécurité, la mobilité de la population, ce ne sont pas juste des mots, mais bien des lunettes qu’il faut mettre et à travers lesquelles on doit regarder chacun des dossiers, en sachant que ces engagements devront teinter toutes les décisions.
En oubliant l’intérim assuré par Ginette Bellemare en 2019, Pascale Albernhe-Lahaie deviendrait la première mairesse élue de Trois-Rivières si elle remporte cette élection. Ça, on lui en parle beaucoup.
«Les gens n’ont pas toujours conscience que nous n’avons jamais eu de mairesse à Trois-Rivières. Ça parle au monde, et surtout aux femmes âgées. Je me sens accueillie comme une reine dans les résidences de personnes âgées. Même les hommes, ils me disent: on le sait, les femmes ont une manière différente de travailler. J’ai beaucoup d’appuis chez les aînés.»
— Pascale Albernhe-Lahaie, candidate à la mairie de Trois-Rivières et cheffe de Trois-Rivières Ville Forte
Pascale Albernhe-Lahaie le confie: elle n’a jamais rêvé d’être mairesse. Sa famille n’a jamais baigné dans la politique non plus. Elle n’est pas une politicienne de carrière.
Mais ces quatre années comme conseillère municipale l’ont convaincue qu’elle a ce qu’il faut pour y aller. Et qu’il fallait y aller en équipe.
«J’aime ma ville, j’aime profondément les citoyens. Après avoir servi pendant quatre ans les citoyens du district des Rivières, d’avoir contribué à leur qualité de vie, c’est excessivement enrichissant. Je veux l’offrir à l’échelle de la Ville», résume-t-elle.